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Tous derrière les FARDC

«C’est possible de faire de la musique un vecteur de développement durable pour la ville de Kinshasa» (Yolande Elebe Ma Ndembo)

Avez-vous déjà entendu de «  Kinshasa Ville créative de l’Unesco » ?
Et pourtant, la capitale congolaise a intégré le réseau des villes créatives de l’UNESCO en 2015.
Yolande Elebe Ma Ndembo, coordonnatrice de la commission de suivi des programmes de Kinshasa Ville Créative de l’Unesco nous accorde cette interview exclusive pour évoquer en long et en large ce concept qui prend de plus en plus corps dans le secteur culturel congolais, et kinois en particulier. Entretien.

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Expliquez-nous avant tout le concept Réseau villes créatives de l’Unesco ?

Le réseau des villes créatives a été créé par l’Unesco en 2004.
L’idée derrière la création de ce réseau était de favoriser la coopération entre les villes pour laquelle la créativité est un facteur stratégique de développement durable; leur permettre de partager leurs expériences, ressources et développer des projets et des partenariats publics-privés dans le secteur de la culture. Ce sont là les objectifs majeurs visés.

Le réseau compte à ce jour compte 116 membres, et les domaines artistiques reconnus par le réseau sont : l’artisanat et arts populaires, le designer, la gastronomie, arts numériques, la musique et le cinéma.
Kinshasa a adhéré en 2015 comme Ville Créative dans le domaine de la musique.

Qu’est-ce que vous avez hérité du comité précédent ?

Pour parler de la commission de suivi des programmes des villes créatives de l’Unesco à Kinshasa, il a été mis en place en 2016.
L’équipe précédente était coordonnée par le conseiller socio-culturel du Gouverneur de la ville.

« A l’instar des autres villes, nous avons la possibilité de faire bouger les lignes dans le secteur musical et faire évoluer certaines réglementations» 

Cette commission elle a commencée à mettre en place une coopération culturelle avec d’autres villes, notamment un dossier fourni que j’ai trouvé sur la coopération avec la ville de Brazzaville, qui est aussi ville créative dans le domaine de la musique. Un rapport fourni des activités de la précédente équipe est disponible à l’Hotel de ville. Elle a posé les jalons et maintenant, nous avons repris le flambeau.

Etiez-vous choisi pour diriger cette commission sur base de quels critères ?

Yollande Elebe, Coordonnatrice de la commission de suivi des programmes des villes créatives de l’UNESCO

Le poste était occupé par mon prédécesseur au poste de conseiller socio-culturel du Gouverneur, dans le cadre de la continuité des institutions, j’ai été naturellement désignée coordinatrice de ladite commission par son Excellence le Gouverneur Gentiny Ngobila.
Nous sommes dans la continuité tout en portant le devoir d’accompagner le gouverneur dans sa vision de professionnaliser le secteur culturel. Dans cette optique, nous allons venir en appui au Ministère provincial de la culture pour le domaine de la musique. Nous allons également poursuivre les efforts de coopération avec les autres villes créatives de l’UNESCO pour une diplomatie culturelle dynamique et faire en sorte de la mener plus loin, notamment en créant des ponts permettant des formations des personnes évoluant dans le secteur musical, non seulement les artistes mais aussi tous les métiers liés à ce secteur et des créations entre artistes de différentes villes.

Quels sont les projets bancables à implémenter par votre commission ?

Nous avons été désigné par le gouverneur en février 2020. Malheureusement, la pandémie de la covid19 a ralenti nos efforts. Par exemple, pour la journée du 21 juin, nous aurions voulu avoir une conférence-débat sur l’économie de la musique. Ce n’est que partie remise. En ce moment, nous sommes sur notre premier objectif de sensibiliser et vulgariser le concept « ville créative de l’UNESCO afin que chaque kinois s’en approprie. Ce travail d’appropriation doit être fait également par nos partenaires tant aussi, tant au niveau public que privé.
Nous devons expliquer l’intérêt qui est le nôtre en tant que ville de faire partie de ce réseau.
A l’instar des autres villes, nous avons la possibilité de faire bouger les lignes dans le secteur musical et faire évoluer certaines réglementations adaptés aux enjeux de l’heure et qui pourraient permettre de rendre se secteur économique viable. Nous sommes à l’ère du numérique, la musique se vend de plus en plus en ligne, il est bon d’adapter les règlementations à cette nouvelle donne. Nous avons aussi l’épineux problème de la piraterie et des droits d’auteurs ainsi que le besoin en infrastructure de production et de création… tous ces problèmes sont pour nous des occasions de mettre en place une réflexion avec toutes les entités concernées, tant publiques que privées.

… Aurez-vous les moyens de votre politique musicale ?

Pourquoi pas? Prenons un exemple en Afrique,: Au Nigeria, par exemple, la musique rapporte aussi bien aux musiciens qu’à l’Etat, pourquoi pas chez nous? Les artistes deviennent millionnaires de par leur travail et l’Etat reçoit ses taxes. C’est du gagnant gagnant. En quoi cela ne serait pas possible chez nous? Voyons le cas d’Abijan et de FEMUA par exemple, ce festival permet aussi d’attirer du tourisme, les hôtels, restaurants, services de transport etc en tire un intérêt pecunier. A Kinshasa, nous avons des festivals de qualité qui ont besoin d’être soutenus ou du moins, d’être mis dans des conditions qui leur permettent de devenir aussi grands. Tout ça nécessite une réflexion et des réglementations qui aura un résultat gagnant-gagnant pour tout le monde si nous arrivons à faire de la musique, un vecteur du développement économique durable pour Kinshasa.
Visualisons la musique autrement. La musique n’est pas qu’un divertissement, mais un business au sens propre du terme.
Je suis parfois triste de voir nos artistes vénérés à l’extérieur du pays, mais se produisant dans des endroits non adaptés ici au pays.
Il nous faut également arriver démocratiser la musique. La covid19 nous a montré nos limites. Il est anormal de ne voir les beaux concerts que dans la commune de la Gombe. La problématique des infrastructures culturelles est un autre problème majeure sur lequel il est nécessaire de se pencher, la musique étant avant tout populaire.

Le gouvernement central a émis le vœu de racheter la parcelle de Papa Wemba pour ériger un musée et un studio. Vous n’allez pas proposer à vos collègues de le faire à Matonge au Village Molokai ?

C’est une très bonne idée. Je suis très contente que cette parcelle ne puisse pas disparaitre. Ça fait partie des patrimoines culturels kinois comme l’espace 1-2-3, Village Molokai, ce sont des symboles. J’ai toujours regretté que le Ciné Palladium ait été rasé. Il n’est pas trop tard, il est encore possible de créer une économie autour des lieux mythiques kinois qui permettraient de créer du tourisme culturel dans Kinshasa. Imaginez par exemple le village Molokai aménagé et ouvert aux touristes. Autour, il peut y avoir des magasins de vente des petits souvenirs notamment des porte-clefs avec des effigies de Papa Wemba. Une vraie économie peut se développer autour. Si l’économie de la musique est bien faite, la musique elle-même peut avoir un apport incroyable dans le budget de la ville de Kinshasa et du pays.

Etre membre du Réseau villes créative est-t-il synonyme de réception des financements de l’Unesco ?

Kinshasa, Ville créative

(Rire) Non. Etre ville créative cela ne veut pas dire que nous allons forcement recevoir des fonds pour exécuter tel ou tel projet. Non. Vous êtes une ville créative parce que vous avez adhéré à une vision.
En donnant corps à cette vision, il peut naître une coopération et des projets pour lesquelles des financements pourraient être disponibilités. C’est possible mais ce n’est pas l’essentiel. Il ne faut pas penser qu’il y aura de l’argent qui va nous tomber dessus juste par le fait d’être membre du Réseau Villes Créatives de l’UNESCO. Nous devons avant tout entant que ville nous assumer. Kinshasa étant une mosaïque culturelle et l’épicentre de la culture congolaise puisque Kinshasa compte en son sein, des ressortissants de toutes les provinces et tribus du Congo, ce potentiel artistique intarissable peut se transformer en une économie prospère si nous le voulons. Il est réellement possible de faire de la musique un vecteur de développement durable économiquement pour la ville.

En termes de mandat public, il ne vous reste qu’à peine trois ans, selon votre planning, quels sont les projets à réaliser ?

Ce que nous voulons faire, c’est de poser les jalons. Doter la ville d’une politique culturelle, serait déjà un grand pas. Avant de construire une maison, il faut qu’il ait une fondation. Nous n’allons pas inventer la roue, faisons en sorte de l’améliorer et d’innover.
Et peut-être que dans les cinq ou dix années à venir, les conditions de vie des artistes seront meilleures.
Notre projet imminent sera de lancer un débat de fonds sur tous ces sujets, avec tous les acteurs kinois du secteur musical. Mais n’oubliez pas que nous ne sommes qu’une commission et nous travaillons sous la tutelle du Ministère de la culture et des arts provincial pour qu’ensemble nous portions la vision de son Excellence le Gouverneur de la ville dans le domaine des arts et la culture.

Onassis Mutombo

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