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De « Mushi » à Lutumba Simaro : Quand une page d’histoire fauche une autre !

« Si un lecteur pouvait prendre chaque page lue, l’arracher, la froisser et la jeter dans la poubelle, que deviendrait le livre ? », s’interroge un homme de culture.

Avenue Mushi débaptisée Lutumba Simaro

En effet, à l’occasion de ses 80 ans d’âge et 60 ans de carrière, le poète Lutumba Simaro Masiya avait émis le vœu, depuis le mois de janvier 2018, de voir la célèbre avenue de la commune qui l’a vu grandir, celle de Lingwala être débaptisée pour porter son nom. Et c’est ce qui a été fait officiellement depuis ce lundi 19 mars 2018. Donc, l’avenue Mushi devient Lutumba Simaro. Mais derrière cette débaptisation, c’est une page d’histoire d’une ville, mieux, d’une nation qu’André Kimbuta jette dans les oubliettes.

Les réactions n’ont pas tardé sur les réseaux sociaux.  « Pourquoi débaptiser des avenues qui font partie de l’histoire de la Ville ?…Voila comment nous détruisons l’histoire du pays… Pourquoi pas une école d’art ou encore construire une salle de spectacle qui porterait son nom ?… problème de vision », écrit Ados Ndombasi, comédien et metteur en scène, dans un forum whatsapp réservé à la culture et arts.

« La mémoire de l’histoire ne peut pas se remplir »

Didace Pembe, sur son compte twitter, qualifie cet acte d’insulte grave aux ressortissants du territoire de Mushi dont il est originaire. « Je suis indigné que le nom de tout un territoire de la République dont je suis issu, soit substitué par le nom d’un artiste, important soit-il ! ça ne va pas s’arrêter là ! C’est porter une insulte grave aux ressortissants de ce territoire», regrette t-il sur @DidacePembe.

Dans ce même ordre d’idée, l’artiste MicroMéga Bandefu propose plutôt la construction de nouvelles routes, nouveaux édifices et les baptiser des noms de nouveaux personnages de l’histoire, plutôt que de remplacer les anciennes qui ont pourtant toujours leur place dans notre histoire. « La mémoire de l’histoire ne peut pas se remplir, pourquoi donner aux nouveaux la place des anciens ? » s’indigne ce poète-slameur.

Evoquant l’appellation de l’avenue 24 novembre, Barick Buema a été rejoint par un autre slameur Péter Komondua qui pense qu’ « Il y a bien des places à Kinshasa que je trouve leur appellation très aliéné qui mériteraient d’être changée. « La place des évolués », à mon avis, c’est insultant lorsqu’aujourd’hui nous savons qui était un évolué. Je conclus pour dire que tout n’est pas à conserver et tout n’est pas à changer non plus », note-t-il.

Joëlle Botamba aurait voulu que Lutumba Simaro écrive un livre. Et de signifier « cela aurait été une richesse culturelle de plus de sa part ».

Quand les autorités de la ville piétinent l’histoire !

Avenue Bokassa devenue Luambo Makiadi

Derrière chaque nom se cache un pouvoir et une histoire, dit-on. Les avenues à Kinshasa surtout ont été dénommées en référence à l’histoire du pays soit en appel aux villes, territoires, clans, Nfumu, noms glorieux ou encore temps de gloire de la RDC. Mais, le système veut chaque gouvernement ou régime modifie des appellations selon son entendement bradant toute une histoire parfois glorieuse de toute nation. Les exemples sont légion. Christophe Muzungu, vers les années 2003, gouverneur a.i de la ville de Kinshasa se précipite pour changer l’avenue «  Nfumu Lutunu » en avenue du « Livre » dans la commune de la Gombe. Or, des notes d’histoire fiables indiquent que Mfumu Lutunu est le premier congolais à avoir reçu et discuté avec Henry-Morton Stanley sur les rapides de Kinsuka.

Pour se rendre compte que l’autorité de la ville pose parfois des gestes vitaux à la hussarde, comptez : l’avenue « Flambeau » est devenue Tshamala, « Camp Mobutu » en « Camp Kabila », avenue Bokassa (ancien Président du Centrafrique) Luambo Makiadi, avenue « Tombalbaye » devenue « Tabu Ley »,…  curieusement, à ce jour, les anciennes appellations sont fréquent sur les langues kinoises et ses avenues sont généralement mal entretenues.

Si seulement l’Etat congolais voulait honorer le « messie », Lutumba Simaro !

Musée en construction à Kinshasa, dans la commune de Lingwala

Il est l’une des rares figures congolaises de la chanson à avoir été surnommé « Masiya » : « Messie ». De sa guitare à la chanson, Lutumba Simaro n’est pas un chanteur mais il reste un nom qui titille le succès des célèbres musiciens africains.

Un observateur reste convaincu que « si les décideurs congolais avaient besoin de l’avis de Lutumba sur la débaptisation de cette avenue, je crois que le poète naturellement s’y opposerait ». Ceci, affirme t-il, que ce geste n’a pas été précédé d’une étude préalable.

 De son vivant, Lutumba Ndo Manueno Simaro assiste à la construction de la plus grande et imposante infrastructure culturelle dans sa commune de Lingwala, aux encablures du Palais du peuple. Ce quadragénaire serait très heureux de savoir que son nom est collé au plus grand musée de la RDC.

Onassis Mutombo

 

 

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