Trois titres seulement ont suffit au groupe MPR (Musique Populaire pour la Révolution) de s’afficher désormais comme le fer de lance d’un mouvement devenu orphelin depuis que Lexxus Legal avait décidé de monter sur une nouvelle scène, politique. « Lobela ye Français », «Dollars» et « Tika biso to fanda », trois chansons du style rap folk soukous chanté en lingala parfois en français, le MPR vient de sonner véritablement une révolution dans la musique hip hop resté sans leader, ni défenseur.
Le groupe a un nom interpellateur et évocateur des vieux souvenirs d’un Zaïre (Congo) puissant. MPR est le nom de ce groupe hip hop de la capitale Kinshasa. Mais MPR, c’est aussi une référence historique à l’ancien parti du président Mobutu à l’époque du Zaïre. Yuma et Zozo, qui composent le duo, n’ont qu’une vingtaine d’années, mais déjà beaucoup de talents. Leur entente est telle que les deux chanteurs ont décidé d’habiter ensemble afin de mettre à profit leur temps de travail, a-t-on appris d’une source proche de ce groupe.
« Les deux jeunes artistes doivent bien s’entourer et s’affirmer face à de nombreux partenaires pour pouvoir développer leur projet artistique (…) »
« La force de MPR est la discipline. Ce groupe est encadré par un grand expert en communication et un expert de l’art visuel ce qui fait que leur succès n’est pas un hasard. Voir un talent est une chose et avoir une carrière en est une autre car tout doit être calculé et bien préparé avec précision. La langue est un facteur pour capitaliser mais ça tire aussi des stéréotypes liés à notre culture locale. Elle peut jouer un grand rôle dans leur émulation surtout que leur musique est très loin de l’obscénité, mais il ne doit pas arrêter de créer artistiquement», analyse Yan Mambo, réalisateur et Directeur des programmes chez Univers Groupes TV.
Au départ, MPR comptait 3 membres sous le nom RB (Résistance Bantus). Et ce n’est qu’en 2016, que ce groupe a pris sa forme actuelle grâce au manager et producteur Mani Loko. Leur style rap-rumba, mixé avec de l’afrobeat, est maintenant bien identifié, n’hésitant pas à le mélanger parfois au ndombolo, folk, r’n’b et dancehall. La signature d’un contrat de production avec le label La Clique Music est ajoutée parmi les éléments déclencheurs d’un carton sur la scène urbaine kinoise qui n’a pas jusque-là des indicateurs musicaux et générateurs. Tout compte fait le groupe MPR fait son chemin.
Le style vestimentaire, les textes,…
Etant le groupe de la semaine de la page facebook de Arts.cd, des internautes, fanatiques et observateurs n’ont pas manqué des mots. Des professionnels du secteur événementiel ont appréciés la collaboration qui existe entre les deux jeunes artistes. « Le style vestimentaire, les textes, les clips, il propose un produit totalement différent de leurs concurrents. Cet aspect le rend unique et ça cartonne bien », souligne Flora Engulu, manager d’artiste et opératrice culturelle.
Pour elle, les deux jeunes artistes doivent bien s’entourer et s’affirmer face à de nombreux partenaires pour pouvoir développer leur projet artistique et vivre de leur métier. Elle craint que ce groupe embrasse plusieurs casquettes. Pour pérenniser leur élan, d’autres proposent d’ailleurs au MPR de s’ouvrir à des collaborations et saisir à bras le corps les opportunités offertes par le numérique.
« MPR est compté parmi les groupes qui ont brisé les codes du succès réputés en RDC. Les thèmes abordés dans leurs chansons dépeignent artistiquement les réalités sociales qui sont de nature à jouer sur la pérennité. Étant donné la précarité dans la perception des droits d’auteurs en RDC , le groupe MPR devra livrer des shows pour palier à ce problème financier qui risque de freiner l’élan », conseille l’animateur culturel Randy Kalayi.
Face au succès, l’argent, les femmes, Henry O’neal M’Bane proposer à MPR de rester uni. « Que le Bon Dieu vous accompagne et surtout ne pas oublier d’où l’on vient, des potes qui vous ont soutenu #MPR », rappelle-t-il.
Chroniqueur depuis plusieurs années, Jordache Diala est plutôt trop regardant sur la pérennité des jeunes MPR. A l’ère de la nouvelle technologie de l’information et de la communication, « il est important que MPR comprenne et maitrise le rouage et le fonctionnement du circuit de vente numérique, martèle Jordache Diala, journaliste au Quotidien La Prosperité et Secrétaire Général du Collectif des artistes et des culturels (CAC). Et de poursuivre que ce groupe peut aussi recourir au marketing viral ou à la vente de proximité. D’où, ces jeunes artistes doivent être eux-mêmes les premiers agents commerciaux de leurs produits (chansons) sur le terrain. Et le plus important, pense-t-il, les deux doivent protéger leurs œuvres en s’affiliant dans une société des droits d’auteur pour assurer leur carrière.
La présence remarquée de ce groupe dans le milieu musical sonne ainsi un grand retour de la musique urbaine kinoise sur la scène kinoise. Deviendra-t-il leader de ce mouvement ? gardera-t-il le cap avec des titres toujours captivants ? Nombreuses sont les questions qui restent sans reponse mais entourant ce groupe qui devient à pas de tortue l’identité du rap à Kinshasa.