mardi, novembre 25
Meet the target Banner
Meet Logic PRINT Banner
Tous derrière les FARDC

LIBRE OPINION | Quand Jimmy Cliff réveillait Kinshasa : le témoignage bouleversant de Coco Malabar

Il est des artistes dont la musique traverse les frontières pour devenir partie intégrante de destins individuels. Jimmy Cliff, décédé ce 24 novembre 2025, fut de ceux-là. Rencontre avec un homme pour qui cette mort sonne comme un arrachement.

« Jimmy Cliff a changé ma vie sans le savoir. » Coco Malabar, musicien belgo-congolais au surnom évocateur, ne cherche pas ses mots. Ils jaillissent entre les larmes, chargés d’une vérité que seule la musique peut porter.

congolais telema / patrie

Retour en arrière. Kinshasa, quartier de Bandal, fin des années 70. Le Zaïre de Mobutu vibre au rythme de la rumba congolaise. Personne ou presque ne connaît le reggae. Bob Marley n’est pas encore devenu l’icône planétaire que l’on sait.
C’est dans ce contexte qu’un adolescent en pleine rue entend une voix. Une voix différente. Puissante. Magnétique.


« On me dit : c’est Jimmy Cliff. De quelle nationalité? De la Jamaïque. Pour nous, c’était la première fois d’entendre qu’il existait un pays nommé la Jamaïque. »
Ce jour-là, le jeune homme qui rêvait de journalisme bascule. La musique ne sera plus jamais un simple divertissement. Elle devient vocation, obsession, raison d’être.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Elle plonge ses racines plus profondément encore, dans l’intimité d’une relation mère-fils tissée au fil des morceaux de Jimmy Cliff.
« Ma mère adorait l’écouter, avec Laurent Voulzy. Quand j’ai eu des ennuis à l’école et que je me suis confié à elle, elle a mis son plus beau pagne et sa blouse chic pour aller rencontrer mes professeurs. Pendant toute cette période, on écoutait Jimmy Cliff. »
Ces souvenirs, Coco Malabar les porte comme des reliques. Sa mère est partie. Jimmy Cliff vient de la rejoindre. Reste la musique, pont jeté entre les vivants et les morts, entre Kinshasa et Kingston, entre hier et aujourd’hui.

L’universalité d’une voix

Le parcours de Coco Malabar illustre ce phénomène fascinant : comment un artiste jamaïcain des années 70 a pu devenir le pilier émotionnel d’un jeune Congolais, au point d’influencer ses choix de vie et de forger son identité artistique.
« Ce n’est pas Bob Marley, ce n’est pas Michael Jackson. Jimmy Cliff, c’est une partie de moi. C’est lui qui a forgé mon destin. »

En cette journée de deuil mondial, des milliers de Coco Malabar pleurent à travers le monde. Des fans qui ne sont pas seulement des admirateurs, mais des fils et filles spirituels d’un homme qui chantait la résilience, l’espoir et la dignité.

Jimmy Cliff s’en est allé. Mais à Bruxelles comme à Kinshasa, sa voix continue de résonner dans le cœur de ceux qu’il a, sans le savoir, sauvés.

Franck Tatu