A Kinshasa, la journée du 6 avril a vécu sous le rythme des fanfares kimbaguistes qui ont défilé à travers les grandes artères de la ville pour saluer la mémoire du précurseur de leur religion, Simon Kimbangu.
Pour lui rendre hommage, l’artiste multidisciplinaire, Rodrigo Gukwikila a exposé quelques photos du prophète congolais à Kintambo, sur les mûrs de Bilanga mobile, son espace d’expression artistique afin de susciter des questions et recueillir des réactions sur ce personnage. Comme pour éclairer l’opinion sur le bien fondé de son action, l’artiste Rodrigo Gukwikila a accordé une interview à Arts.cd pour brosser le bien fondé de cette exposition. (Entretien).
Le 6 avril a été décrété une journée fériée en mémoire de Kimbangu. Qu’est-ce que ce dernier représente pour vous ?
Si nous sommes dans la liberté aujourd’hui, c’est parce qu’il y a eu des gens qui ont combattu pour qu’on puisse aujourd’hui se promener calmement. Nfumu Kimbangu, dans un sens logique, est notre ancêtre. Le terme même Kimbangu était considéré comme tabou dans nos familles. Moi je l’ai connu à mon enfance, on ne pouvait pas parler de Kimbangu, on ne pouvait pas fréquenter les Kimbaguistes. En 2004, j’achète le pendentif de Kimbangu, j’arrive à la maison, papa crie sur moi mais aujourd’hui, ça devient une pensée sociale, tout le monde est à la maison journée Kimbangu, le temps évolue et les choses commencent à se dire librement.
Parlant de cette date, quel message avez-vous voulu faire passer à travers les œuvres que vous avez exposées en plein Kintambo?
Parlant du 6 avril 1921, on a vu le tout premier miracle de Simon Kimbangu à Nkamba, c’est ainsi que tout a commencé. Entant que artiste, j’ai présenté deux images de Kimbangu qui prétendent confusion sur sa vraie personne. Dans cette optique, je présente ces images pour savoir ce que les gens disent de lui afin de créer une réflexion autour de ce personnage et susciter des questions dans les chefs des spectateurs.
Qu’est-ce que nous disons à propos de Kimbangu? Et aussi savoir me questionner pourquoi mon père refusait mais aujourd’hui il est devenu sympa me parlant des ancêtres de la famille.
On aperçoit sur les dessins, deux flèches : en vert et en rouge. Qu’est-ce cela veut exactement signifier ?
Comme j’ai dit à Kimbangu aujourd’hui c’est nous. Eux se sont battus. Nos ancêtres aussi étaient dans la lutte. Donc, nous devons également nous battre. Kimbangu qui est au centre représente une silhouette qui exprime la pensée Kimbangu. Il y a la flèche vers l’histoire et la flèche vers l’avenir. La flèche rouge vers l’histoire, on doit penser à tous les sacrifices, les évènements du passé et le combat. Et la flèche en vert, nous devons nous battre pour aller de l’avant.
Entant que artiste, quelle démarche artistique avez-vous utilisé pour produire ces œuvres ?
Moi, J’ai cette liberté de m’exprimer que ça soit avec la peinture, les mots, le dessin, etc. Pour cette occasion, j’ai trouvé mieux de créer quelque chose et de réfléchir autour de cette journée. J’ai utilisé la technique du dessin sur papier et réalisé quelques portraits qui représentent sa photo et quelques images qui nous représentent. Nous avons eu des témoignages qu’on a utilisés comme sculpture à l’instar du casque d’un motard qu’on a placé devant l’œuvre qui explique sa réalité avec Kimbangu.
Comment êtes-vous mis dans la peau d’intermédiaire de ceux qui nient et ceux qui saluent le combat Kimbangu à travers votre exposition ?
Je ne m’attache pas à une religion. Il y a un ADN qui me lie à Kimbangu donc j’ai reconnu son combat qu’il est passé sur terre étant un maître dans sa pensée. Ceux qui refusent ou acceptent, moi je reste dans le questionnement. Le monde évolue raison pour laquelle on a apposé les œuvres sur la moto. Cette dernière est fixée, elle questionne la pensée. La première fois, il n’y avait pas un concept précis. Et c’est la deuxième fois que nous avons créé le concept à propos de Kimbangu. C’est tout une fois de réfléchir autour de ça. On aura des histoires qu’on pourra écrire sur ce que les gens disent, à part ça, la vérité est réelle.
Aujourd’hui, nous avons atteint un autre cap. De quelle façon, pourrions-nous perpétuer le combat de Kimbangu ?
Par rapport à ma démarche artistique, j’ai mis la flèche qui est un symbole de perpétuité, même la façon de montrer que je suis dans la répétition. Pour ce combat, il faut renouveler les énergies dans le travail de mémoire. Ce n’est pas seulement autour de Kimbangu mais nous devons également réfléchir autour des autres ancêtres. Qu’on tienne compte du timing et de l’espace. C’est tous les jours que nous devons nous développer.
Propos recueillis par Henock Mukuna