Professeure d’histoire coloniale à l’Université d’Ohio aux Usa, spécialisée en histoire culturelle de la RDC, Sarah Van Beurden a accordé une interview à Arts.cd sur la problématique de restitution des œuvres d’arts des congolais emportées par des belges du temps colonial. Il est impérieux, pense-t-elle, que les deux pays mettent en place une commission pour poser les jalons notamment juridiques.
La problématique de la restitution des œuvres d’art emportées par des belges pendant la colonisation refait encore surface. N’est-il pas temps pour les deux pays d’en parler ?
Oui, je pense bien. Il y a ouverture imminente du nouveau musée national à Kinshasa. Et il y a le lancement de la rénovation du grand musée africain à Bruxelles. Je trouve que c’est un très bon moment pour en parler. C’est vrai aussi que le débat dans la presse européenne va encore s’agrandir.
En RDC, ce débat reste jusque-là dans le milieu restreint des artistes sans l’implication réelle des politiques, n’est-ce pas un frein ?
Je l’impression qu’avec le temps, ça va changer. Comme la situation politique en RDC a changé, beaucoup de choses vont bouger. On ne sait jamais. Evidemment, ce n’est pas à moi de dire Ce que le Congo doit faire. Après plusieurs visites au Congo, je dois affirmer que ce débat est en train de prendre de plus en plus de l’ampleur. Beaucoup des gens réfléchissent déjà sur le contenu de ce mot « restitution ».
En Belgique, « Restitution » ou « Don », deux mots se disputent pour designer cet acte symbolique. En tant que professeure Belge, comment le désignez-vous ?
A mon avis, ça doit être une restitution. Puisque c’est très important pas seulement pour le Congo mais également pour la Belgique pour réfléchir sur son passé colonial. La réflexion sur le passé colonial ne se fait pas suffisamment en Belgique. Ce débat autour de la restitution peut apporter une dynamique sur son passé colonial en Afrique.
Qu’elles sont les préalables pour que la RDC récupère ses œuvres ?
A mon avis, il faut constituer une commission des experts congolais et belges qui doivent préparer un rapport complet qui fera des recherches sur la source de provenance des collections, créer des lois qui vont accompagner ce processus et faire des recommandations destinées aux décideurs de deux pays.
Tous les musées belges sont-ils prêts à restituer aux congolais leurs œuvres ?
J’ai l’impression que la mentalité a changé. Je dois reconnaitre que le Directeur du Musée de Tervuren a dit publiquement qu’il était ouvert pour commencer cette discussion. Et qu’il était ouvert à retourner quelques objets des congolais.
… Et pour les autres Musées ?
Pas tous, je pense. J’ai l’impression que le Musée d’Anvers a commencé à réfléchir sur ces choses. Il y a d’autres par contre qui hésitent jusque-là. Puisqu’il y avait une demande venant de New Zélande pour récupérer les œuvres. Ce débat, je dois dire que ça ne concerne pas seulement l’art africain ou l’art congolais, mais il y a d’autres cas aussi. Il y a des collections des indiens qui sont en Belgique qui ont été obtenu d’une manière violente qui font aussi de polémique. Le débat n’est pas seulement sur la collection du Congo, mais d’autres nations se lèvent aujourd’hui pour demander cette restitution.
Onassis Mutombo